•  Lanvallay et son orthographie

    ou

    - Lanualae - 

     

         Origine orthographique de LanvallayOrigine orthographique de Lanvallay

     

     

     

     

     

    Chartes photographiées sur micro-films aux A.R.D des Côtes d'Armor

     

    A droite charte originelle datée de 1201 et contenant dans son texte le terme : Parrochia Lanualae. Rédigée en cette dite année 1201 cette charte présente au travers de son texte l'aumonier de la paroisse de Lanvallay lequel est appelé : Eudone capellan  de Lanualae ou Eudes chapelain de Lanvallay. Une copie de cette charte illisible pour nous, puisque très "condensée", fut réalisée au XVII siècle dans un latin complet et non abrégé quant à lui. Comparez les deux chartes et comprenez ainsi le principe même de l'abréviation de l'écriture du latin ancien, abréviation rendant toute charte latine identique incompréhensible pour nous.                                                                                                                                                       L'orthographe des mots latins, en certains mots écrits, y est souvent différente aussi. C'est cette "copie originelle latine" qui a été traduite après que J.Geslin de Bourgogne en ait donné une transcription dans son ouvrage consacré à l'évêché de Saint-Brieuc.                                                    Référencée aux Archives :  DDML H.3360V cette même copie ne peut toutefois remplacer la charte originelle de 1201 ci-dessus elle référencée aux mêmes Archives de Maine et Loire : H.3357 IV. Voir la traduction de cette "copie originelle" au chapitre : Les chartes judiciaires et religieuses. 1201. Première apparition de la paroisse de Lanualae.                                                                  L'existence d'Eudes est reprise dans une autre charte, non datée celle-ci, reprenant un litige ayant opposé les possesseurs de la terre et moulin de Quincombre au prieuré du Pont ces derniers ayant été dans l'obligation morale de reconnaitre les aumones que feux leurs ancestres avaient offert aux moines du dit prieuré. Ces moines en effet, par ce même don religieux,  avaient reçu les dites terres de Quincombre et son moulin. Nous ne détaillerons pas ici ni l'histoire de cette terre ni l'histoire de son moulin, tous deux apparaissant donc dès vers 1200, puisque cela est déjà un travail en cours de réalisation, travail mené par Daniel Brandily de Pleudihen. Nous n'expliquerons pas non plus la transcription de la charte relative au moulin de Quincombre laquelle fait partie aussi du même travail. Nous ne présentons ici ces deux chartes que parce qu'elles sont les deux plus anciennes chartes présentant l'orthographe écrite de notre commune et attestant l'existence même de notre paroisse dès la fin du XII siècle.

     

     

     

    Son origine orthographique et religieuse

     

     

    L’apparition de la forme écrite de Lanvallay, patronyme étudié au travers de ses premiers seigneurs, surgit pour la première fois dans la seconde moitié du 12ème siècle en la personne de William de Lanvallei lequel devint sénéchal de Rennes pour le roi Henry II d’Angleterre avant d’être confirmé gouverneur héritier du castel de Colchester, en Angleterre, par ce même prince (En notre commune de Lanvallay ce patronyme apparaît pour l’une des premières fois, en 1219, lors des décès de Guillaume et de Roland de Coëtquen. Le nom de notre commune est alors orthographié Lanvalei. La toute première fois que cette appellation apparait au titre de notre "paroisse" reste cependant l'année 1201 cela dans une charte datée et aujourd'hui micro-filmée aux Archives départementales des Côtes d'Armor. Cette charte provient des Archives d'Angers et contient le terme suivant: Parrochia Lanualae. Cette charte met donc en scène la paroisse de Lanvallay et la chapelle du port de Dinan l'église paroissiale de Lanualae étant alors déposée entre les mains d'Eudes chapelain de Lanvallay: oze de pore de Dinan et eudone capellan  de Lanualae...parrochia Lanualae et capella de pore de Dinan.

    Une autre date, avec sa charte bien sur,  est importante pour nous; c'est celle de l'année 1132 année bien antérieure aux dites années 1201 et 1219 toutes deux citées ci-dessus. Pourquoi cela ? cette charte est probablement celle en laquelle apparait pour la première fois en notre histoire le nom écrit de notre paroisse même si celle-ci n'est pas directement citée il est vrai. En effet en cette charte écrite en 1132 sera seulement citée "l'église" de Lanvallei. et cela au travers de son Saint-Patron, Saint-Méen. Mais si l'église de Lanvallei existait en la dite année 1132 est-ce que sa paroisse elle n'existait-elle pas déjà ?

     

    Dans les chartes les plus anciennes, et notamment au travers du premier seigneur de Lanvallay cité, nous rencontrons souvent l’écriture Lanuualei pour Lanvallay, le W ayant entre temps remplacé les deux lettres associées du U comme dans Riwal lequel s‘écrivait, au IX  siècle, Riuuall,  Riuual donnant par la suite le prénom Riwallon et cela dès le XI  siècle). 

    L’écriture d’une même langue, dans son ensemble, a toujours suivi une évolution linguistique naturelle même si les formes écrites de nos patronymes, aujourd’hui, nous semblent êtres revêtues d’une puissante rigidité orthographique. Cette rigidité orthographique, propre aux patronymes, est toutefois récente dans le temps. Pour quiconque étudie les actes anciens liés aux baptêmes ou aux décès, les différences orthographiques apportées à un même patronyme sont en effet monnaie courante tout au long du 17ème siècle. Ces modifications successives peuvent souvent représenter un important faisceau d’incertitudes pour quiconque étudie une même généalogie.

    Le nom de Lanvallay a donc connu lui aussi plusieurs formes d’écritures orthographiques. Notre commune de Lanvallay, d’un autre côté, a-t-elle toujours été nommée de ce même nom quelle que soit l’écriture alors utilisée ? Depuis quant a-t-elle pris ce patronyme ? Trouver aujourd’hui la période exacte de l’histoire durant laquelle ce nom fut utilisé pour la première fois nous ait actuellement impossible (L’apparition de ce patronyme apparait à la fin du 12ème siècle en la personne du seigneur William ou Guillaume de Lanvallei ou Lanuualei ; le patronyme en Angleterre n’étant pas encore généralisé. Dans un acte de justice, rédigé à la fin du 12ème siècle, nous apprendrons que Jean de Lanvallei était le petit-fils d’Alain lui-même dit fils d’ Henri. En Angleterre, de nombreux seigneurs furent ainsi nommé fils de, tout comme Warin 2ème du nom lequel sera nommé Warin Fitzwari. William de Lanvallei, dans des écrits rédigés au 17ème siècle et lui étant consacrés s'écrira en vieux François également William de Langvale. Aussi quels sont les liens orthographiques ayant unis hier les termes et de Lanuualei et de Langvale ? Quelles sont les origines mêmes de cette transformation orthographique ? Il est à ce titre difficile aujourd'hui de prendre pour seule origine possible de ce patronyme l'existence même d'un petit moine relevant de la tradition dite populaire, Balao, lequel passe pour être la seule origine orthographique possible de l' appellation de notre commune, petit moine ayant vécu plus de 6 siècles avant même l'apparition de la première écriture de Lanuualei).

    J’aurai pourtant personnellement aimé savoir si notre commune, par exemple, s’appelait ainsi avant l’apparition de ce seigneur nommé William de Lanvallei. J’aurai de nouveau aimé pouvoir savoir si notre commune était antérieure ou postérieure à l’apparition du prieuré du port à Dinan. Lequel des deux a précédé l’autre ? (avec déjà la présence citée, entre 1070 et 1118, d'un bourg dit aux moines au Pont à Dinan lorsque fut décidée la fondation du prieuré du pont à Dinan, tout laisse à penser que ce même bâti, celui du dit bourg aux moines, peut donc être effectivement antérieur à l'apparition même de la paroisse de Lanvallay).  Le nom de notre ancienne paroisse est-il le fruit d’une association linguistique et si oui, comment cette évolution patronymique a t’elle pu se réaliser ? Une seule réponse apportée à l’une de ces questions aurait le mérite de soulever, même légèrement, le voile jeté ici par ces mêmes incertitudes.

    Aujourd’hui, l’origine du nom donné à Lanvallay semble provenir d’un Saint prénommé Valay (ou Saint-Balay). Ce dernier, au 6ème siècle, serait un moine en provenance du monastère de Landevennec (Saint Valay fait effectivement parti intégrante de ces différents Saints faisant tous partis de la Tradition dite Populaire) ; il aurait donc été un disciple de Gwenolé puisque ce dernier est le fondateur attesté de ce monastère lequel fut bâti vers 485. (Ce monastère est situé dans le Finistère, baigné par L’Aulne. Saint Gwenolé fera ériger ce monastère à la demande de Saint-Patrick lequel décèdera en 461. Pour essayer de mieux comprendre les motivations de la retraite de Saint-Valay en notre région et de son éventuel travail d’évangélisation, nous avons, pour cheminement principal, le déroulement de la vie spirituelle de Saint-Patrick apparut en songe à Saint-Gwenolé.) 

     

     

    Cet établissement religieux respectera très longtemps la règle celtique d’Irlande. (Variante du Christianisme propre aux pays celtiques évangélisés par Saint-Patrick à partir de 432. Cette forme religieuse chrétienne est sensée s’être arrêtée en 818 au monastère de Landevennec lequel adopte alors les règles de St-Benoit. Malgré toute son autorité, l’église n’arrivera cependant pas immédiatement à stopper cette façon de pratiquer la religion catholique. Ces racines religieuses celtiques subsisteront encore longtemps en Irlande et en Bretagne, ce mouvement perdurant au travers des cultes de St-Yves né en 1253 et de Ste-Anne notamment. Aujourd’hui, l’église peut rencontrer encore certaines traces de ce paganisme. Paragraphe tirés du livre de Christian Guyonvarc’h titré « Les Royaumes celtiques »). 

    Pendant toute la première moitié du premier millénaire, l’Europe, délimitée par les pays du Maghreb au sud, par la mer noire à l’Est et les terres situées au sud de l’Ecosse, (Jean Guiffan, Chargé d’enseignement à l’université de Nantes, « Saint Patrick et la christianisation de l'Irlande », 2002) due subir les vagues migratoires successives germaniques. Pendant cette même période interminable, les différentes terres celtiques, l’Irlande notamment, furent coupées de Rome et de son empire. Elles seront donc également coupées du Vatican et de son enseignement religieux aussi. Les premiers missionnaires ne viennent en Irlande que dans la fin du 4ème siècle, peu de temps avant Saint-Patrick. Presque tous originaires du continent, ils abordent alors une terre druidique, terre encore vierge de toute mission évangélisatrice.

    Saint-Patrick est un jeune breton né dans le nord de l’Angleterre, vers 390. Jeune enfant, il est enlevé à ses parents et emmené en Ulster. Sur cette terre irlandaise, pendant plusieurs années, il va servir un maitre druide. Sa vingtième année passée, il parvint à regagner son Angleterre natale puis, peu de temps après, il rejoint la Gaule pour commencer une formation religieuse.

    Saint-Patrick retourne en Irlande en 432 pour rependre l’évangélisation de cette terre toujours celtique et dans sa religion et dans ses mœurs. Il semble l’avoir évangélisé avec beaucoup d’amour, une très grande sincérité aussi; l’ile, à sa mort, était entièrement christianisée au travers du principe du monachisme d’alors. La vieille religion druidique, par toute l’attention et la douceur de St-Patrick, a pu ainsi, semble t’il, entièrement s’intégrer dans la nouvelle religion d’Irlande et cette dernière héritera ainsi de toute une partir de cette ancienne culture druidique ou païenne.

    L’église nouvelle d’Irlande, œuvre de Saint-Patrick, sera pendant les deux siècles suivant une église basée essentiellement sur l’organisation monastique. Elle se différenciait de l’église de Rome par une autre conception de la Foi et de sa mise en pratique. La notion de l’ascétisme y était très développée et les ermites probablement fort nombreux. Certaines de ses règles, très pures, (elles seraient probablement aujourd’hui des règles dures et physiques) étaient en complète opposition avec Rome. Pâques connaissait, par exemple, une date différente, le baptême possédait un autre rite et la tonsure des moines n’était pas identique aussi.

    La responsabilité de cette jeune église sera très importante tout au long du 6ème et 7ème siècle. Elle sera, en effet, le refuge du Christianisme occidental pendant les dernières vagues des migrations germaniques (Jean Guiffan, même livre).

    Toutefois, par l’intermédiaire de la conquête anglo-normande et de l’établissement de monastères venus du continent, le Vatican réussira, au 11ème siècle, à repositionner définitivement sous son autorité la jeune église d’Irlande et cela sera la fin de ce monachisme propre à l’Irlande et voulu par Saint-Patrick.

    (Pendant tout le haut moyen-âge, les monastères vont s’étendre dans toute l’étendue du monde chrétien et laisser ainsi leur empreinte. Monastère : de monachisme. Forme d’enseignement religieux catholique née au 4ème siècle dans laquelle les monastères et les moines se présentent comme étant les nouveaux et véritables Guides spirituels.) Mais revenons à Saint-Valay.

     

     

    Nous n’avons aucune autre information personnelle et réelle sur Saint-Valay. Ce dernier s’appelait Balae, semble t-il, dont la forme ancienne serait Bachla. La transformation orthographique a pu transformer le B et V et nous avons ainsi Valae au lieu de Balae. En vieux breton, Lan signifie Ermitage. En langue celtique, Bach signifie petit et Lae signifie fidèle ou religieux, soit le petit religieux. Nous avons donc l’apparition de l’écriture Lanvalae (ou Lanbalae. Rappelons toutefois que la forme la plus ancienne rencontrée, dans des actes rédigés au 12ème siècle, reste Lanuualei. Dans un texte plus tardif, écrit au 16ème siècle, lequel décrit les raisons du mariage de William de Lanvallei, texte écrit en vieux françois, William est cité William de Langvale) pour l’Ermitage du petit religieux. Au 12ème siècle, dans les actes latins écrits et rencontrés, le patronyme de William de Lanvallay s’écrivait tantôt Lanuualei,  Lanvalae ou Lanvalaio. Le nom latin de notre paroisse, au 13ème siècle, s'écrivait Lanvalei. A la fin du 18ème nous rencontrons la forme francisée de Lanvalay avec un seul L; enfin, aujourd'hui, l'orthographe de notre commune est Lanvallay avec deux L. Depuis le 17ème siècle la forme Lanvallay avec ay en terminaison orthographique, que cela soit avec un seul ou deux L, est la plus présente...                                         La première branche seigneuriale des seigneurs de Lanvallay, laquelle s'établie aussi en Angleterre dès la fin du 11ème siècle, branche que nous allons très bientôt survoler, s’écrira donc soit Lanuualei, soit Lanvalaio, soit Langvallé, soit Lanvalé, soit Lanvallee, soit Lanvalai, soit Lanvallei et plus tard, au18ème et 19ème siècles, même la Vallet aussi. Nous voyons donc ici même la richesse linguistique apportée à ce même patronyme depuis sa première apparition orthographique. Alors quand est-il de l'origine exacte de l'écriture de notre commune ?  Est-elle véritablement unie au prénom de ce petit ermite ?                              Notre Histoire régionale et traditionnelle garde toutefois la conviction que ce petit ermite vint de Landevennec pour s’isoler et s’établir au bord de notre rivière, la Rance. (L’abbé Joseph-Malo de Garaby, dans son ouvrage écrit en 1839, ouvrage traitant des différents Saints bretons, l’assigne cependant en tant qu’ermite retiré dans sa foi sur la montagne de Penflour, près de Châteaulin.) 

    L’orthographe de Lanvallay se veut  donc être ainsi et aujourd'hui le témoin même de la présence de Saint Balae hier présent en notre contrée. Quelle a été la portée post-mortem du rayonnement spirituel de ce petit ermite si ce dernier a vraiment existé ? Nous n’avons, sur ce point précis, aucune réponse à apporter. Cette portée, si petite soit-elle, à cependant su laisser ici une partie d’elle-même. Une autre ville, toute proche de notre commune, porte également dans son nom la trace de la présence supposée de ce petit ermite. Il s’agit de Ploubalay. Ploubalay ne veut-il pas dire paroisse de Balae ?

    Toujours est-il que la formation étymologique de notre paroisse s’est faite entre le 6ème siècle et le milieu du 11ème siècle, entre l’éventuelle venue de Balae en nos terres et la première écriture lue de Lanvallay en la personne de William de Lanvallei cité sénéchal de Rennes pour Henry II roi d’Angleterre (Certaines personnes pensent que Balae aurait pu établir son ermitage en partie basse de notre commune, proche du rocher d’Alcaïs, l’actuelle Courbure. Très tôt dans le Temps, à la base de ce rocher et posée dans les méandres de la rivière, fut établie une petite chapelle laquelle, dans le courant du 17ème siècle, répondait au vocable de Notre Dame de Bon Réconfort. Cette chapelle est citée pour la première fois en 1330. Elle disparue définitivement à la fin du 19ème siècle; elle relevait alors du chapitre de Saint-Malo de Dinan). 

    La seconde lecture de ce patronyme est celle d’Ivo de Lanvallei lequel personnage a été inscrit dans un Rotuli curiae Regis établit en 1190 (Rotuli curiae Regis : Registre formé d’un rouleau de papier tenu par des juges itinérants anglais pour pouvoir enregistrer toutes les amendes judiciaires afin de pouvoir les ramener aux shérifs et êtres ainsi rendues au trésor public du Roi d’Angleterre). La famille seigneuriale anglaise de Lanvallay sera à l’origine d’une baronnie irlandaise dite de Lanvallei laquelle sera apparentée à la couronne d’Ecosse au 13ème siècle. En conclusion, notre commune, par son appellation, plonge ses racines dans l’enseignement spirituel de Saint-Patrick ; elle possède donc toujours, par son patronyme même, des liens affectifs avec une certaine page de l’Histoire d’Irlande.

     

     

     

    Jean Pierre Fournier 

     

     

     

     

     

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  • Fitzwarin III, petit fils de Josselin de Dinan ou les véritables origines de Robin Wood

    Errol Flyn dans  Robin des bois film de 1938

     

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    Les origines de Robin des bois, Outlaw

     

     

     

    Nous avons tous aimé, lorsque nous étions enfants, les légendes emplies de preux chevaliers et je me souviens encore de ces heures passées à lire, et à relire même parfois, ces aventures Epiques ; les premières heures de la jeune Angleterre furent aussi le creuset de mon enfance. Maintenant que je suis grand et le cheveu déjà grisonnant, je continue pourtant à m’émerveiller devant les mêmes histoires.

    Parfois l’Histoire, le hasard aidant, rattrape les livres tracés que nous avons tant aimé et ce que nous pensions ne relever alors que de l’imaginaire se dévoile tout à coup au travers d’une certaine réalité. Les légendes très souvent sont le fruit de cet imaginaire mais quelques fois, néanmoins, elles se révèlent êtres construites sur des heures réelles et sombres laissées, par un  long cheminement, au plus profond de notre mémoire collective.

    Qu’en est-il de celle de Robin des Bois, cet outlaw au cœur si généreux ? Est-elle en effet entièrement imaginaire ou bien romancée ? Et même si cela était, que viendrait-elle faire ici ce sur bout de papier Côtissois ? L’Histoire romancée de Robin des Bois n’est pas le récit relatif à un seul personnage. C’est l’assemblage d’un ensemble de faits plus ou moins sombres tous relayés et tissés par cette Mémoire. Le 12ème siècle et 13ème siècle, en Angleterre, furent le canevas de ce récit. Les luttes intestines entre les rois successifs et certains barons anglo-normands, tout au long de cette période, construisirent ce personnage au travers du vécu réel de 4 outlaws différents mais généalogiquement reliés. Il y en a d’autres, bien sur, mais sur ces derniers aucun acte officiel n’a jamais été établi ; la preuve écrite sur le parchemin n’existe pas. Ils sont alors du côté obscur de la Légende.On trouve renfermés au british muséum, sur de très vieux parchemins, les comptes rendu de certains procès relatifs aux agissements des 2 premiers et plus importants de ces 4 outlaw. Ces derniers, pour les historiens anglais, passent en effet pour être les Voleur- Bandits ayant le plus contribué à la construction de l’histoire de Robin des Bois. Les pièces judiciaires ainsi établies analysent ces barons contestataires au travers de leur personne, au travers de leurs propriétés foncières, énumérant et citant également les membres de leur famille proche. La place me manque ici pour vous relater leurs vies de Hors la loi, l’origine de leur marginalisation et de celle de toute leur famille. Aussi, me dois-je d’aller à l’essentiel tout en abordant brièvement leur généalogie commune. (Cette dernière est indispensable si nous voulons pouvoir positionner ces individus les uns par rapport aux autres).

    Dans la continuité d’un texte écrit à l’occasion de la fondation du prieuré de la Magdeleine du pont de Dinan, on apprend que plusieurs familles seigneuriales de notre région émigrèrent en Angleterre.

     Alors que la motte féodale dressait depuis peu ses pieux de bois au dessus de la Rance,  Geoffroy 1er de Dinan, vers 1100, seigneur des lieux, autorisa la construction du prieuré du pont de Dinan proche de ce pont. Ce fait est relaté dans un acte écrit lequel est le plus ancien manuscrit relatif aujourd’hui à notre commune. Dans cet acte non daté, Geoffroy donne certaines de ses terres avec l’assentiment d’Alain de Dinan son fils, frère de Josselin de Dinan. Geoffroy de Dinan, accompagné de ses 3 fils, Alain, Olivier  et Josselin de Dinan, participera à l’après conquête de l’Angleterre appelé par Henry Beauclerc 1er. Ils seront tous les quatre de grands possessionnés et Olivier (Oliver) et Josselin (Josce) feront souche sur cette terre nouvelle. Olivier retournera toutefois sur sa terre natale sur laquelle il fera construire l’abbaye de Boquen ; il y sera inhumé. Il en sera de même pour la branche première seigneuriale de Lanvallay.                             William II de Lanvallei(ay) passe pour être l'arrière-arrière-arrière petit-fils de Richard II duc de Normandie ce dernier étant lui-même le grand-père de Guillaume le Conquérant. William 1er de Lanvallay aura pour épouse en effet Guénora de Saint-Clare la petite-fille de Hamon de St-Clare connétable de Colchester et seigneur de Walkern, seigneur né vers 1090 ; il faut savoir aussi que ce dernier de cet fait est le fils de Mauger le Jeune de Normandie, archevêque de Rouen et comte de Saint-Claire sur Elle dans le Cotentin, fils cadet lui même de Richard II de Normandie ci-dessus. Williams Ier de Lanvallei, connétable du château de Colchester, sera entre 1166 et 1168 le sénéchal de Rennes pour Henry II roi d’Angleterre. Présent dès 1100 sur les terres  de la seigneurie de Walkern, dans le Sussex, cette famille Côtissoise dite de Lanvallay près de Dinan, à l’instar de Josselin de Dinan, restera définitivement sur ses terres anglaises ; de cette famille, descendent aujourd’hui, entre autres, les enfants de lady Diana de Spencer. Mais revenons à notre histoire.

     

    Jean sans terre est roi d’Angleterre en 1199. Ce dernier se révèle être un roi très financier ; il applique très tôt des mesures fiscales anti-seigneuriales, quelles soient financières ou sociales, remettant en cause, en autre, le principe même de la propriété par l’Expropriation. Les seigneurs normands vont-ils aussi se fédérer autour d’un noyau seigneurial lequel sera à l’origine de l’une des premières révolutions sociales anglaises pour ne pas dire européennes. Ce mouvement débouchera sur ce que l’on appellera la Magna-Carta, la grande charte, laquelle obligera le roi à respecter, parmi d’autres choses, l’ensemble des biens fonciers des différents barons normands et leurs différents droits féodaux. William III de Lanvallay fils de William II cité ci-dessus sera l’un des 25 barons devant veiller à sa bonne exécution. Déjà son père, William1er  Lanvallei (mort en 1180), sera cité sur un écrit plus ancien relatif à la constitution de Clarendon (En fait certains considèrent cette  constitution comme étant la  1ere révolution sociale anglaise) rédigée par Henry II d’Angleterre en 1164.

    Dans les premières années du 13ème siècle naissant, il était un jeune baron nommé Fulk II de Fitzwarin (fils de Warin) seigneur du castel de Wittington. L’ensemble des domaines de Fulk seront ainsi saisis (il sera dépossédé de tous ses biens) avec une excessive autorité et une grande injustice royale. Fulk jure aussitôt, sur son honneur, de ne plus devoir aucune allégeance à Jean et renonce définitivement, par ce fait même, à le reconnaître pour son Roi ; il est désormais un Outlaw sur ces terres, lesquelles hier étaient les siennes. Ce seul litige personnel va s’étirer sur deux générations, le père et le fils ; le personnage principal de cette scène sociale sera Fulk III de Fitzwarin, le fils de Fulk II petit-fils par sa mère de Josce ou Josselin de Dinan

     Les actes judiciaires relatifs à leurs procès et écrit sur des rouleaux de parchemins, aujourd’hui au British Muséum, expliquent à eux seuls, la raison de la révolte des Fulk père et fils laquelle sera reprise par l’ensemble des barons. Ces dépositions les présentent tous deux comme étant des parias, des voleurs pourchassés par la justice royale. La mémoire des hommes cependant, enregistrera un récit beaucoup plus humain et beaucoup plus profond lequel sera repris de génération en génération et la légende ainsi construite fera très tôt, dès le XV siècle, l’objet d’un récit manuscrit à l’origine de la célèbre histoire de Robin des bois. Mais qui était Fulk de Fitzwarin ?  Pourquoi ces personnages réunis nous intéressent-ils aujourd’hui ? Le fait de connaître leur contribution importante sinon essentielle à la construction de la légende de Robin des Bois est-il suffisant ? Les noms déposés dans ces rouleaux de justices vont nous l’apprendre sans tarder.

    Fulques II de Fitzwarin, sur ce sol qui l’a vu naître, l’Angleterre, va rencontrer sa future épouse, mère de Fulk III de Fitzwarin. Elle  se prénomme  Hawise (Havoise) de Dinham ; elle était la fille de Josce (Josselin) de Dinham (Dinan), seigneur très possessionné en Angleterre, propriétaire du château et des terres de Ludlow en Shropshire,  biens matériels assis sur les marches Galloises (Josselin de Dinan entrera en possession des terres anglaises de Geoffroy I de Dinan, son père, quand ce dernier rentrera en Bretagne. Henry II, roi d’Angleterre et père du Roi Jean sans Terre, lui offrira également les terres et le manoir de Lambourn dans le Berkshire, les terres du Ginge en Wantage aussi et ceci n’est qu’un tout petit aperçu de l’ensemble de ses biens très importants). Josce de Dinham est cité comme étant un parent rebelle sur les actes judiciaires relatifs à Fulk II. Fulk III, fils de Fulk II et de Hawise de Dinham, sera réuni dans la légende à Mathilda Fitzwalter sous le nom de Robin des Bois et de Marianne mais ils n’ont pas eu dans l’Histoire un destin commun. (Mathilda Fitzwalter ou Marianne est une personne ayant réellement existé. Enfant de Robert Fitzwalter, baron et futur meneur responsable de la Magna-Carta, elle est le sujet principal d’un autre drame provoqué par le Roi Jean. Cette jeune et très belle damoiselle tombera  follement amoureuse d’un jeune chevalier inconnu lors d’un tournoi auquel assistera le roi Jean. Ce dernier essayera de jeter son dévolu sur Marianne mais en vain. Les deux jeunes amants seront obligés de s’enfuirent tous les deux dans la forêt et là, parmi les arbres, sous leur frondaison, ils s’uniront et s’aimeront.  Le roi Jean très jaloux fera assassiner le jeune époux et il offrira anonymement un bracelet empoisonné à la jeune veuve ; Marianne mourra. Le gisant de la soit disant Marianne est toujours visible aujourd’hui en l’église du Prieuré de Little Dunmow dans l’Essex. Il est également à noter la parenté existante entre Maud le Vavaseur et Mathilda Fitzwalter ; Maud Le Vavaseur, compagne de Fitzwarin III et belle fille de Fitzwarin II, aura, en effet, pour premier mari, Thibault Fitzwalter parent de Robert Fitzwalter ci-dessus ; il faut noter aussi que Mathilda est le synonyme de Maud en anglais et il signifie Marianne en français)

    J’ai bientôt terminé mon texte. Voici la fin :

    La légende de Robin des Bois s’est construite à partir de plusieurs faits historiques relatifs à la Magna-Carta dont certains acteurs furent Fulk II et III, Josce de Dinham et Mathilda Fitzwalter, pour ne faire plus qu’un récit qui gardera la trace écrite de l’implantation géographique de certaines de ces terres, de certains de ces manoirs. (Ce fait à lui seul tend à confirmer le rapport historique établit entre la légende et ces quatre personnages). Les descendants de Josce de Dinham, et Fulques III de Fitzwarin lui même, retrouveront tous l’ensemble de leurs biens spoliés après  la signature de la Magna-Carta.

     Josce de Dinham (Josselin de Dinan ci-dessus. Josselin est présent à Dinan en 1108 au côté de son père Geoffroy 1er de Dinan lorsque celui donna aux moines  de Saint-Martin le Grand, de l'abbaye de Marmoutier, l'église de Saint-Malo de Dinan), beau-père de Fulk II et grand-père de Fulk III, sera donc également l’un des tous premiers acteurs artisans de la légende de Robin des Bois. J’aime à penser que le grand-père de Robin Wood, petit garçon, était présent aux côtés de son frère ainé quand ce dernier donna, avec son père, certaines de ses terres pour la construction de notre petit prieuré (petite abbaye dirigée par un prieur laquelle dépend d’une Abbaye mère) de Lanvallay. Le beau-père et grand-père de Robin des Bois était Côtissois ou "Lanvallay"  de cœur ; ce que j’aime cela !

     

    Jean Pierre Moy

     

     

     

    NB. 1- La famille seigneuriale de Lanvallay se mélangera dans les seigneurs de Dinan en 1350 avec le mariage de Ivo de Fitzwarin. Ce dernier est mort en Septembre 1414 et il fut inhumé dans l’église de Wantage.  Un superbe gisant chiffré avec une moustache, très rare, le représente avec cinq pieds de hauteur en pleine armure. Gisant toujours visible aujourd’hui. Cliquez sur le lien de téléchargement ci-dessus afin de pouvoir étudier l'arbre de généalogie commun des seigneurs de Dinan-Warin Fitzwarin de Wittington- Lanvallei 

     

      

     

     

    N.B. 2- Lire livre intituled : The History of Fulk Fitz-Warin translated by Alice Kemp- Welch.

     

     


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