histoire de lanvallay
Etude proposée et réalisée par monsieur Claude Bognet.
Aveux des prieurs commendataires de la fin du XIV siècle au début du XVI siècle.
Présentation des 6 premiers aveux.
S’il est communément admis que le régime de la "commende" s’est mis en place dès le XV siècle, le prieuré de la Magdeleine du Pont à Dinan disposait d’une bonne longueur d’avance, face à cette institution tant décriée, puisque l’aveu rendu par le premier prieur commendataire connu, le cardinal de Gergii, porte la date du 28 décembre 1398. Le cas est suffisamment précose pour ne pas passer sous silence l’existence d’un tel texte. Le monastère voisin des bords de Rance, à Léhon, ne fut mis en commende qu’en 1451 [La commende, institution officialisée en 1440, portait attribution des bénéfices d’une abbaye ou autre couvent à un abbé séculier, tel un cardinal, ou à un laïque à qui revenait la charge d’entretenir les bâtiments et de payer une rente aux religieux pour leur subsistance. Elle donna lieu à de nombreux abus, les commendataires ne résidant pas sur place. A Léhon le premier prieur commendataire connu est Guillaume d’estouville, arrière petit fils de Charles V, archevêque de Rouen et cardinal d’Ostie].
Précédemment, la Madeleine du Pont était dirigée par des prieurs "conventuels", ceux qui résidaient sur place. Le nom, et le plus souvent le prénom, de cinq d’entre eux nous sont parvenus grâce à d’anciennes chartes. Y sont cités successivement Even en 1198 ; Guillaume de Montors en 1232 ; Jacques en 1292 ; Philippe en 1297 ; Aymeri en 1335 clôt la liste.
Le terme commendataire, de "commendatayre" dans les chartes lues, n’apparaît qu’en 1508, dans un aveu rendu par le prieur Christofle May [variante de Moy], le dernier de la série de six faisant l’objet du présent chapitre.
Ces premiers aveux des prieurs commendataires doivent être traités à part, non qu’ils soient les seuls rédigés sur parchemin, les autres le seront également jusqu’en 1654, mais parce qu’ils se résument à une dizaine de lignes empruntant des formules convenues. Il ne faut donc pas s’attendre à de longs développements quant à l’état des lieux. Et si les domaines extérieurs au fief ne sont pas énumérés, c’est qu’ils constituaient probablement plus de droits sur autrui que de véritables possessions foncières monastiques
L’un des deux aveux rendus par Tristan de la Vallée, en 1493, que nous reproduisons plus loin intégralement résume en deux lignes l’ensemble constitué par le domaine prieural et les rentes consenties : des maisons, des cours, des jardins et des pourprins [espace clos de murs] pour tous biens fonciers, mais non l’église et le cimetière exclus tous deux du temporel du fait de la puissance divine à laquelle ils étaient consacrés.
Les rentes temporelles se montent à 10 livres de rentes angevine [Une rente angevine est une rente qui se paie lors de l’Angevine, c'est-à-dire le jour de la fête de la Nativité de la Vierge, le 8 décembre], sommes dues par les teneurs. Quant aux devoirs et obéissances dus à l’autorité ducale, ils consistent en prières et oraisons pour le salut du souverain, formule que l’on retrouve à l’identique dans tous les aveux des prieurs au temps de la Bretagne indépendante. Même si les parchemins sont difficiles à manipuler et à déchiffrer du fait de la présence de plis dans leur surface bosselée et de la pâleur de l’écrit, d’autre part nous ferons notre profit des transcriptions à trous, semés sans doute d’approximations. Cela n’empêche pas de saisir le sens et la date des aveux et de s’assurer du nom du prieur commendataire, dans l’attente d’une restitution complète des textes.
Nous présentons brièvement ci-dessous les 6 premiers aveux conservés dans les collections des Archives Départementales de Loire-Atlantique, sous la cote B849, puis les transcriptions correspondantes.
- Le 28/12/1398. Aveu du cardinal de Gergii. Le prieur commendataire est ici un prélat choisi parmi le gratin de la hiérarchie catholique. La charge de prieur conventuel est du même coup vouée à l’extinction.
- Le 23/02/1407. Aveu de Jan de Brogni. L’abbé Auguste Lemasson a rapporté un extrait des lettres et mandements du Duc Jean V de 1789 à 1815, tome 1 page 101. L’an 1407, Jean Fraczon-Alarmet, autrement dit Jean de Brogni, cardinal et évêque d’Ostie, est prieur commendataire du prieuré du Pont, pour lequel il rendait aveu le 23 févrieur 1407, ledit prieuré payaoit 40 sols de procuration à la fin du XIV siècle.
- Le 15/07/1461. Aveu de Jehan du Bellay. Le bon état de conservation du parchemin portant l’aveu de Jehan de Ballay, alias Jehan du Vaily, nous apermis d’établir une transcription complète du texte. C’est encore un évêque, en l’occurrence de Poitiers, que revient le bénéfice du prieuré, bénéfice accordé à perpétuité et sans intermédiaire par le duc de Bretagne. A ce titre, le nouveau commendataire devra prières et oraisons tant à son souverain seigneur qu’aux prédécesseurs er successeurs. Il s’engage à entretenir le prieuré qu’il a reçu en fief amorti, fye amorty. Cette précision signifie que le droit de succession dit de mainmorte a été payé ou qu’il n’avait pas à l’être. Enfin, s’il n’a pas été fait mention de l’état des lieux par le menu, c’est qu’aucun changement n’est intervenu - Il s’agit de tout le temporel, formule déjà rencontrée dans l’aveu précédent.
- Le 07/.09/1474. Premier aveu de Tristan de la Vallée. L’état des lieux se précise enfin : les maisons, jardrins et hébergements et généralement tout le temporel y compris les rentes. En contrepartie sont dues au seigneur amendes, condamnations, prières, oraisons et obéissances.
- Le 20/03/1474. Second aveu de Tristant de la Vallée. La nécessité de rédiger un nouvel aveu ne peut s’expliquer que par un changement de suzerain : le prieur rend cette fois hommage au Roy et non plus au Duc. Les biens fonciers sont à nouveau énumérés : les maisons, court, jardrins et pourprins, à quoi il faut ajouter bien entendu les rentes temporelles, le tout en échange de prières et oraisons.
- Le 23/07/1508. Aveu de Chritofle May. Qualifié de Prieur Commendatayre et de perpétuel administrateur de la Magdeleine, ce personnage vient de clore la série des six premiers bénéficiares connus des revenus du prieuré du pont. Nous retrouverons ce même établissement moins d’un demi-siècle plus tard avec un luxe de détail, à chacun des 7 prochains aveux lequels sont :
- Domaines relevant du prieuré d’après l’aveu de Jehan le Clerc, en 1543.
- Domaines relevant du prieuré d’après l’aveu de Pierre Ferron, en 1556.
- La vente du temporel ecclésiastique du prieuré de la Magdeleine, en 1587.
- Domaines relevant du prieuré d’après l’aveu de Jan de Horis, en 1613 [il doit ici y avoir une erreur de date puisqu’en 1612 Jan Horis établira un contrat de ferme avec le sieur Jan Hamon. J.P Fournier].
- Domaines relevant du prieuré d’après l’aveu de Michel Bouvard, en 1639.
- Domaines relevant du prieuré d’après l’aveu de Florent Mareschau, en 1654.
- Domaine relevant du prieuré d’après l’aveu de Dom Floraine, en 1673.
Aveu du cardinal de Gergii, nommé prieur du prieuré le 28/12/1398
1. Par notre Court de Rennes fut présent Charles Béchufflaut, en notre présidail procureur de...Révéfend père en Dieu de...
2. cardial de Gergii et priour dou priouré de la magdeleine du Pont à Dinan, lequel recognut et confessa,
3. recognoist et confesse que le temporel dudit priouré que tient ledit cardinl est tenu de mon pouvoir
4. seigneur Monseigneur de Bretagne; nuement [sans intermédiaire] et prochement soubz sa jurisdiction et obéissance à sa court de Rennes
5. ce qu'...est dû... mondit seigneur, recognoissance et obbeissance ... ... temporel
6. ... ...... ...... des actes de notre dicte Court le mercredi à Sts-Innoçamt l'an mil trois cent quatre vingt diz et
7. oust [huit].
Aveu de Jehan du Bellay nommé prieur le 15/02/1461 1. Jehan de Vaily [ou Jéhan VI du Bellay, dit le Jeune. Né vers 1400 et décédé à Poitiers en 1479. Evesque de Fréjus de 1455 à 1461, abbé de Saint-Florent lès saumur. Il fut évesque de Poitiers en 1461], elu et confermé evesque de Poictiers, conseiller du Roy nostre sire, et administrateur perpétuel du 2. prieuré de la Magdalène au Pont à Dinan, congnois et confesse estre homme et subject du 3. Duc mon souverain seigneur et tenir de luy prouchamment [prochement, sans intérmédiaire ou directement] à sa Court et barre de Rennes tout le 4. temporel de mondit prieuré, par cause de quoy je confesse devoir à mondit souverain seigneur et à ses 5.prédécesseurs et sucesseurs prières et oraisons et avecques ce obéissance comme de fyé amorty [fief amorti], lesquelles 6. choses dessus dites et chascunes d'icelles. Je jure tenir et entretenir tant que t(i)endray ledit prieuré; en 7. tesmoing [en témoignage] de ce, j'ay signé ces présentes de mon seing manuel et scellé de mon scel [scellé] dont j'ay acoustumé user 8. en telles matières. Donné à Paris le quinziesme jour de juillet l'an de grâce mil quatre cens soixante 9. et ung.
Premier aveu de Tristan de la Vallé nommé prieur le 047/09/1474 1. Aujourd'hui en juridiction s'est comparu religieux et honneste frère Tristan de la Vallée, prieur 2. du prieuré de la Madeleine du pont à Dinan, sous sa barre et présidial de Rennes... 3. avecques tous ses biens et rentes à la juridiction d'icelle... .... .... ... lequel fié recognoist
4. et confesse... tenir prochement dudict notre souverain et seigneur à sa barre de Rennes, les maisons 5. jardrins et hébergements dudict prieuré... 6 ... .... ... d'icelui et générallement tout le temporel dudict prieuré ... .... ... par cause 7. de ce devoir, amendes, condamnation, prières, oraisons et obbéissance audict serment, en tout 8. ce que dessus, ledit religieux... apartenit sans jamais aller... .... .... ... et de son assentiment 9. y soit condempné. Fait par la court dudict Rennes devant les plez généraulx [les plaids généraux ou les assemblées de justice] d'icelle le septiesme jour de septembre 10. l'an mil quatre cens soixante quatorze.
Second aveu de Tristan de la Vallée, prieur au pont , aveu fait au roi de France souverain de Bretagne 1. Au jour duy en juridiction s'est comparu frère Tristan de la Vallée, prieur du prieuré du pont à Dinan 2. lequel a confessé estre homme et subject du Roy nostre sire, et de luy à sa barre et présidial de rennes, tenir les 3. maisons, court, jradrins et pourprins d'iceluy prieuré situé près la ville de Dinan ensemble 4. o [avec] les rantes temporeles y deubs qui se montent par deniers dix livres de rante angevine, et par cause desdites 5. choses en devoir à mondit seigneur, prières et oraisons, ainsi et comme fié amorty pour toutes charges 6. et devoirs qu'il a promis debvoir et continuer, et auxdites qu'il sera dudit prieuré desservant et 7. en tenir de son assentiment; y a esté condempné. Fait par la court de Rennes le vingtiesme 8. de mars l'an mil quatre cens quatre vingnts et douze. Souscrit en interligne "tempreles approuvé. [Ce deuxième aveu fut rendu au roi de France Charles VIII lequel régna de 1483 à 1498. En effet à chaque changement de suzerain le vassal était tenu de présenter un nouvel aveu].
Aveu de Cristofle May nommé prieur au prieuré du pont le 23/07/15081. Sarchent touz que par devant la Cour de rennes a esté présent en droit... .... ... et formellement estabvli vénérable et discret Missire
2. Cristofle May commendatayre et perpétuel administrateur du prieuré de la Magdelenne du Pont à Dinan, lequel ... .... ... pour tous
3. ses biens et rentes que tiennent submis à la ... et obeissance de nostre dicte court présidial et barre que missire est
4.par son serment de servir et obbeir... recognoit en estre ... et par cestz présentes congnoist et confesse estre, et qu'il est homme
5. et subject de nostre dicte Court à la juridiction et barre de Rennes pour en tenir prouchement le prieuré dudict lieu de la Magdelenne appendement [ dépendre, appartenir, être soumis à...] 6. et déppendans d'icelui sans aucune restriction, et en devoir en raison de, prières et oraisons comme de fyé amorty et selon que 7. le cas le requiert, et obbéissance en oultre d'icelle pour tout ce que en est ledict Cristofle oudit nom May par son serment 8.tenir sans jamais aller contrevenir en aucune manière ... .... .... ... son ... et assentement... de 9. nostre dicte Court establiz... le y avons condemné et condempnons ................prins à Dinan en la maczon [fait àDinan en la maison] de Guillaume Perrier le 10. ving et troisiesme jour de juillet, l'an mil cinq cenz ouit. rentes en interligne soi approuvé
Claude Bognet